Samuel Delvenne, notre Samuel, a reçu ce 21 février le trophée de l’Espoir Sportif 2019 lors de la remise des Mérites Sportifs de la commune de Floreffe. Félicitations à lui ! C’est avec beaucoup d’émotion et de fierté que nous avons assisté à ce moment exceptionnel. Ce prix couronne les efforts d’un élève hors du commun et nous donne, à nous, l’espoir d’une pratique sportive plus inclusive…
Trisomie 21, quelle différence pour Samuel ?
Samuel pratique l’Aïkido au sein du Kokki Dojo depuis septembre 2015. Aujourd’hui âgé de 16 ans, il a successivement obtenu les grades de 6ème Kyu (24/09/15), 5ème Kyu (03/12/16), 4ème Kyu (10/11/18) et 3ème Kyu (22/06/19), lors d’examens publics où il a démontré sa maîtrise technique et son évolution personnelle.
Je pourrais vous exposer en détail ce qui fait, aux yeux de la plupart des gens, sa différence, le fameux chromosome surnuméraire sur la 21ème paire de chromosomes. La trisomie 21 s’accompagne d’un retard mental, d’un faible tonus musculaire et d’autres troubles physiques qui semblent a priori difficilement compatibles avec une pratique sportive. Et pourtant…
Plutôt que de vous parler de ce chromosome “en trop” et de ses symptômes, je préfère vous présenter toutes ces qualités que Samuel a en abondance et déploie avec générosité depuis plus de 4 ans dans sa pratique de l’Aïkido.
À bien des égards, Samuel, par son attitude, ses actes et sa personnalité, incarne tous les principes de l’Aïkido, tels que les a enseignés son fondateur, ô Sensei Morihei Ueshiba, et tels qu’ils se transmettent au Dojo.
La non-violence
L’Aïkido est un art martial décrit d’abord comme un “art de paix”. Quand deux aïkidokas se font face, nous ne parlons pas d’“adversaires”, mais de “partenaires”. Comme ô Sensei aimait à le dire lui-même, son art n’est fait “ni pour combattre, ni pour vaincre [mais pour] supprimer la notion d’ennemi”.
Grandir dans la pratique ne se conçoit que dans le partage avec l’autre, sans démonstration de force ni de violence. Dans notre société où, trop souvent, considération rime avec domination, nombre de sportifs peinent à se libérer du réflexe de s’affirmer par la force, voire la brutalité.
Chez Samuel, vous ne trouverez nulle trace de cette noirceur d’âme : tant avec les enfants qu’avec les adultes, il pratique dans un esprit de paix, sans faire violence ni à soi-même ni à son partenaire.
La douceur, la gentillesse, qualités parfois décriées et moquées par les plus cyniques, sont un bien précieux. Nous ne pouvons que les apprécier et les louer quand elles se manifestent de façon si évidente chez une personne qui nous est chère. Tout naturellement, grâce à son enthousiasme permanent et à sa générosité de coeur, Samuel s’est parfaitement intégré dans le club.
L’humilité et le respect
Dans toute la tradition des arts martiaux, ces valeurs sont essentielles. L’humilité peut être considérée comme un corollaire de la non-violence : il s’agit de laisser de côté son ego, souvent envahissant, pour se mettre dans une disposition d’écoute et d’accueil. Cette disposition n’est possible que si l’on s’évertue à cultiver le respect.
Être capable de reconnaître ses limites, sans se rabaisser, accepter les conseils et les critiques constructives du professeur, s’adapter à son partenaire, l’aider à évoluer, ajuster sa pratique aux leçons qu’il nous donne, telles sont les applications concrètes du respect prônées par notre Dojo.
Sans artifice, ni faux-fuyant, Samuel offre en toutes circonstances cet état d’esprit bienveillant, à la fois modeste et curieux, qui lui permet de progresser constamment et de faire progresser les autres.
La persévérance
Samuel a d’abord suivi le cours enfants, avant de rejoindre le cours adulte. Il fait déjà partie des “anciens” du club, ceux qui ont réussi à surmonter les difficultés et les obstacles sans se décourager ni s’irriter.
La persévérance, qualité rare chez les plus jeunes, est indispensable en Aïkido. Cette discipline, très technique et exigeante, en a frustré plus d’un, mais pas Samuel ! Avec assiduité, courage et bonne humeur, il illumine de son sourire notre Dojo, année après année.
Cette pratique régulière lui permet de cultiver l’attitude juste entre vigilance mentale et détente, de développer la souplesse, la coordination et l’agilité, et de cheminer vers plus d’harmonie entre le corps et le mental, l’essence même de l’Aïkido.
Son 3ème Kyu est plus que mérité : comme à chaque passage de grade, il a présenté un examen de très haut niveau. Les techniques enseignées requièrent concentration et précision. Étant donné que la motricité fine et une attention soutenue demeurent des difficultés majeures chez Samuel, comme chez la plupart des personnes trisomiques, le choix d’un art martial comme l’Aïkido était une véritable gageure. Toutefois, sa progression est tout à fait remarquable et ne cesse de nous émerveiller.
Un trophée amplement mérité
Voici, à nos yeux, quelques-unes des qualités qui rendent Samuel différent, unique et digne de recevoir aujourd’hui cette récompense sportive de la commune de Floreffe. Pour tous, Samuel est un exemple à suivre, un partenaire au sens fort du terme, un ami.
Encore une fois, félicitations à lui ! Merci aussi au jury qui a reconnu ses nombreux mérites par ce signe de reconnaissance, merci à ses proches qui ont eu la confiance de l’inscrire dans notre club d’Aïkido et l’accompagnent ainsi vers plus d’autonomie jour après jour, merci à tous les élèves qui l’ont si bien accueilli et pratiquent avec lui dans la joie et le partage.
Enfin, espérons que cet événement incitera d’autres personnes, aussi belles que Samuel, à rejoindre notre cours, quelle que soit leur différence !